L’aube illuminât le village de Fushia et ses plaines environnantes. Pas un chat ne courrait les rues dans le village. Mais on pouvait apercevoir à l’orée de la forêt un jeune homme de forte carrure faisant son décrassage matinal. En effet, Rand Al’Thor était un lève-tôt et il ne perdait pas son temps à faire la couleuvre dans son lit. Ce jour là, Rand avait décidé qu’il allait s’initier à une nouvelle technique meurtrièrement efficace.
Afin de bien se réveiller, Rand fit ses cinquante tours de village quotidien en sprint. Après cette mise en jambe, il plongeât dans la rivière qui bordée la forêt afin d’évacuer la poussière et la transpiration accumulées sur son corps. Rand se réveillait toujours comme cela mais lorsqu’il s’entraînait, il prenait un malin plaisir à être encore plus dur envers lui-même. Après son bain dans l’eau glacé de la rivière, il fit une série de cent pompes (sur une seule main sinon c’est trop simple), puis il enchaînât avec une cinquantaine de traction qu’il effectuât sur la branche d’un châtaigner. Pour finir son échauffement, il s’assit en position dite du Lotus et se plongea dans un état proche de la transe.
Après une bonne vingtaine de minute passé comme cela, il s’enfonçât dans la forêt afin d’en atteindre le cœur. Où il dénichât une petite clairière, idéale pour être à l’abri des regards indiscrets.
Là, il entreprit de se remémorer la fameuse technique : Le-Vent-Souffle-Et-Traverse-La-Montagne. Cette technique ancestrale, quasi chimérique, et dont il était le dernier détendeur, permettait à son possesseur de se couler dans le dos de son adversaire à une telle vitesse que le temps qu’il réagisse, il serait déjà mort et éparpillé.
Pour se l’approprier, Rand dût apprendre à faire corps avec le Vent, de façon à saisir le moment où il pourrait se faufiler derrière son agresseur à la vitesse de l’éclair. Il dût apprendre à faire partie intégrante de l’Air afin d’avoir l’élan nécessaire pour que sa foudroyante attaque réussisse à surprendre l’adversaire.
Il s’entraînât durant une semaine et au terme de celle-ci, il n’avait toujours pas maîtrisé la terrible technique. Fou de rage à l’idée qu’une notion lui ait échappé, il baissa les bras et hurla sa frustration aux vents. Les feuilles frémirent et les arbres tremblèrent. Puis il s’écroula, tant il était exténué.
Il fut réveillé par des hurlements lugubres qui retentissaient dans toute la forêt. Il se leva et constata avec stupeur que des loups, grands comme des poneys, avaient envahis la clairière et s’approchaient de lui en montrant les crocs et des grondements pareils à ceux du tonnerre sortaient de leurs gorges.
Rand se mit doucement sur ses genoux, les loups l’observaient toujours et n’avaient pas changé d’altitude. Il se mit debout et se mit à les compter, ils étaient neuf. Aussi noir que la nuit la moins étoilé et aussi puissant que les buffles carnivores d’Armalie. Tout à coup, celui qui était le plus proche de Rand bondit sur lui en visant sa gorge. Rand ne dut son salut qu’à la pierre qui le fit trébucher à ce moment là. Le loup passa par dessus Rand et celui-ci put sentir l’odeur de charogne qui émanait du poil dru du fauve. Les grognements visant à lui faire peur se transformèrent en grognement d’ironie face à sa maladroite esquive. Rand, qui n’acceptait la moquerie de la part d’aucun humain, n’allait pas se lassait faire par de grosses bêtes velues. Il allait passer à l’attaque ! Les monstres durent percevoir le changement car ils se remirent en position d’attaque. Mais c’était trop tard. Les yeux de Rand s’illuminèrent et une expression de joie cruelle qui aurait fait frémir un rocher se peignit sur son visage. Il sentit l’air s’engouffrer dans ses cheveux tandis qu’il passait derrière le loup qui l’avait attaqué, en lui assénant au passage un coup de pied qui le fit décoller du sol. Voyant que leur collègue allait mal, deux loups fondirent sur Rand avec la ferme intention de lui faire payer son acte. Rand sentit un déclic se faire dans sa tête et une il entendit, il vit, il sentit le Vent. Le Vent lui murmurait qu’il pouvait le faire, qu’il avait son accord, il lui enseignât le dernier maillon lui permettant d’accéder à la technique Le-Vent-Souffle-Et-Traverse-La-Montagne… l’abandon total !
Ce fut une boucherie, les loups ne comprirent pas ce qui leurs arrivaient, les coups de Rand pleuvaient sur eux tel une pluie battante sur les carreaux d’une fenêtre. Les loups moururent, leurs corps furent éparpillés aux quatre Vents et Rand restât seul dans la clairière pour contempler le carnage.
Il repartit chez lui au petit matin, avec une expression de béatitude complète sur son visage d’habitude inexpressif. Le Vent ne lui avait pas confié qu’une seule technique, celle-ci n’était en fait que le prélude d’une multitude de techniques, réunies sous le nom de Vent Divin Obscur.